Mieux être · Mieux vivre · Mieux travailler
Qu'avez-vous appris au cours de votre coaching ? « Je suis transformé !!! ».
Entretien préliminaire tripartite : Pierre-Louis, dirigeant de mon manager-futur-coaché nous présente : Francis est un manager à haut potentiel, il est jeune, mais montre déjà une personnalité bien affirmée. Il passe bien auprès de ses équipiers, mais s’autorise parfois un peu trop de familiarité. « Il le sait, je lui ai déjà dit. J’aimerais qu’il soit plus distant je suis sure qu’il gagnerait en autorité. Hein, Francis ? » « Oui, c’est vrai. J’ai très envie de suivre cette formation, j’aimerais arriver à faire plus la différence entre mon moi pro et mon moi perso, et puis je voudrais arriver à pérenniser le travail collaboratif au sein de mon équipe. ».
Pierre-Louis : « je trouve que c’est une chance de se voir proposer un coaching. Il y a une quinzaine d’années, l’un de mes managers a été coaché. […] Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais il est sorti de cette expérience détruit ! ». (Mon cerveau enregistre, et classe vite fait cette phrase dans la case « anodin ». Je l’oublie. Ou plutôt, je l’enfouie, je la rejette : moi ? Dangereuse ? Ce n’est pas possible, pas moi …)
Une poignée de main plus tard, nous nous trouvons mon Francis-manager-futur-coaché et moi en face à face pour nos échanges préliminaires : quels changements souhaiteriez-vous voir se produire durant votre coaching ? « Un changement ? Non, non, moi je ne veux rien changer ! »
Pourtant dans ma tête, il a déjà changé : passer du statut de manager-futur-coaché à coaché, c’est changer. C’est un bon début. Pour moi. Continuons. Maintenant, que vais-je changer pour qu’il investisse l’espace de coaching ? Parce que s’il y a bien quelque chose qui ne change pas en coaching, c’est bien la volonté affichée des primo-coachés à ne pas vouloir changer, juste vouloir faire toujours de la même chose, mais en mieux : « mes collaborateurs travaillent déjà bien en transverse, ils travaillent en mode partagé, ils s’entendent bien, je n’ai rien à dire. Je voudrai juste qu’ils partagent mieux, qu’ils s’entendent mieux pour qu’on travaille mieux ensemble ». Ah …. Une piste de travail : et vous ? « Quoi, moi ? » Vous êtes où, vous ? « Je ne comprends pas votre question » … Ca y est c’est parti : Francis-coaché, les sourcils froncés, me regarde de côté, tête inclinée, il commence à douter de mes capacités intellectuelles. J’ai confirmation : nous avons bien commencé à travailler.
Quelques heures d’échanges, et de cheminements plus tard, nous voici, coach et coaché à l’heure du bilan. Qu’avez-vous appris au cours de votre coaching ? « Je suis transformé !!! ». Et là, c’est moi qui parle. Je suis transformée par cet accompagnement. En quoi a-t-il été si particulier ? Francis m’a mis au travail. Pour quelle raison je n’y arrivais pas ? Ce que je veux dire, c’est que j’avais l’impression de ne pas arriver à entrer en relation avec lui. C’est moi qui doutais de mes capacités à l’aider. Lui discutait, échangeait, analysait… Et moi, j’écoutais, et je cherchais ma place, mon positionnement, ma posture. J’étais empêchée. Empêchée de le confronter, comme paralysée, incapable de lui renvoyer ce quelque chose qu’il m’apportait de lui, et qui était pourtant tellement important qu’on mette au travail. (Et cette phrase qui revient : « Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais il est sorti de cette expérience détruit »). J’en parle autour de moi, avec mes pairs, qui me proposent des pistes d’expérimentation, avec mon superviseur, qui me rassure sur ma posture et me soutient dans mes tâtonnements et mon ressenti. Je tente (« Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais il est sorti de cette expérience détruit »), j’essaie (« Je ne sais pas ce qu’il s’est passé, mais il est sorti de cette expérience détruit »). Et rien. Toujours rien.
Jusqu’à cet entretien. Je débute : « j’ai l’impression que je n’arrive pas à poser le cadre de notre relation… Ça vous fait penser à quelque chose dans votre contexte de travail ? » Ca y est ! Je l’ai ! Je la tiens, ma posture. Trois heures d’entretiens ! Je ne m’arrête plus, heureuse d’avoir décoincé un truc. Chez moi. Surement chez lui aussi. Tout était là : une autre phrase de Pierre-Louis : « il me manque des « je » dans tes indicateurs ». C’était si simple. Il fallait juste changer de pronom. Hantée par Pierre-Louis et son « manager-détruit », j’étais incapable de m’adresser à Francis pour le confronter en débutant par « vous ». Ce « vous » qui me paraissait tellement accusateur. Et pourtant, il ne me venait que des phrases commençant par « vous ». Jusqu’à ce déclic libérateur : et si je commençais par moi ! Par « je » : « j’ai l’impression que je n’arrive pas à poser le cadre de notre relation… »
Et voilà, pour quelqu’un qui ne voulais rien changer… Il est servi. Je suis servie. Quelque chose s’est passé. Il n’a rien changé… Il a juste modifié nos habitudes de travail, renouvelé nos comportements, adapté notre fonctionnement, ajusté notre relationnel, revu nos postures, investi nos places. Bref, je, il, nous sommes « transformés »…
Publié dans la NewsLetter du COS© de janvier 2014 http://static.coachingorientesolution.com/nl/13.html